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Les maux des mots (4)

En ces temps de neige et d'intériorité, quelques mots lumineux du poète, traducteur et critique Roger Munier, récemment décédé :

Ce qui m’anime, obstinément me hante, c’est de tenter d’atteindre le monde sans mon approche couvrante : le monde sans moi. Est-ce possible ? Il me semble que non. Mais le monde peut parfois faire un pas vers nous. Et peut-être, mais ce n’est qu’une hypothèse que je risque : de même que le corps s’ouvre en ses profondeurs dans ce qui n’est plus la santé, de même le monde se rend-il accessible dans ce qu’il a pour ainsi dire de blessé. Dans ses zones effacées, sans rien du prestige des grands paysages qui requièrent nos sens et les comblent, dans ses régions infimes, plus secrètes, en esquive, insignifiantes même. Dans ses friches ou ses lieux arides, ses déserts. La beauté captivante du monde ne va qu’à lui et peut faire illusion, comme la santé dans nos relations avec le corps. Il me semble qu’à l’opposé de tout attrait, dans la pure absence d’éclat, le monde, plus sûrement, mystérieusement, fait signe…”

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