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Biographie

Née en 1972, Anne Le Maître a passé toute sa jeunesse entre les vignes du Mâconnais et les forêts de l’Yonne. De cette enfance bourguignonne, elle a gardé le goût des longues marches dans les bois, du chapardage des pommes et de la collecte des champignons. Un premier voyage au Sénégal à l’âge de 18 ans lui donne le goût de la géographie et des destinations lointaines. Titulaire d’un diplôme d’urbanisme, elle passe des poblaciones de Santiago du Chili aux townships sud-africains. Retour en France : si tout semblait la mener vers des destinations lointaines, c’est à l’occasion de son premier emploi, dans un cabinet d’architecture et d’urbanisme, qu’elle découvre les questions liées au paysage et à l’environnement. Elle participe à la réalisation d’un atlas des paysages de Saône-et-Loire, tout en complétant sa formation par un DEA en histoire des sociétés occidentales. Mais elle rêve d’écriture. En 1995, afin de pouvoir approfondir cette voie, elle accepte quelques heures d’enseignement de l’histoire-géographie dans un collège. Elle se découvre passionnée par le contact avec les jeunes et a longtemps enseigné à Sens, puis à Dijon.

C’est une randonnée sur les chemins de Compostelle qui lui donne l’occasion de publier, en 2002 aux éditions du Rouergue, son premier livre, Du Puy à Conques par le chemin des pèlerins, carnet de voyage dans lequel se rencontrent ses goûts pour la marche, le paysage, l’histoire, les mots… et l’aquarelle, qu’elle pratique pour son plaisir depuis l’âge de 10 ans. Elle a depuis publié, toujours au Rouergue cinq autres carnets de voyage (Jura, Cévennes, Aubrac, Bourgogne) et deux « carnets d’artiste », Sens et Dijon Carnet d'artiste, portraits en mots et en couleurs de villes qui lui sont chères. Devinettes sans queue ni tête, avec l'illustratrice Sandrine Lhomme, est sorti chez Balivernes en 2014. En tant qu’illustratrice, elle collabore avec plusieurs magazines et elle expose régulièrement.
 
Dans le registre de l'essai, toujours poétique et nourrit de son expérience personnelle de marcheuse et d'aquarelliste, elle publie en 2008 Les bonheurs de l'aquarelle, petit invitation à la peinture vagabonde, aux éditions Transboréal.  Et c'est en 2018 sort Sagesse de l'Herbe, quatre leçons reçues des chemins.
 
Au sein de l'Atelier "Bleu de Prusse," son atelier dijonnais fondé en 2010, elle se consacre à l'enseignement de l'aquarelle. Elle mène parallèlement des travaux plus expérimentaux autour de la forme du livre d'artiste, soit seule (Dix leçons de Jacinthe, La Renarde Rouge, juin 2012), soit avec le peintre Hervé Espinosa (Sentinelles, carnet d'arbres, exposé à Sens, été 2012). Désireuse d'approfondir son travail d'écriture, elle est accueillie durant l'été 2012 en résidence d'écrivain à la maison Jules Roy de Vézelay. Elle y entame un travail associant les mots et la peinture, Notre-Dame des Ronces, exposé à l'automne 2013 à l'abbaye de Cîteaux. Un essai poétique, Notre-Dame des Ronces, un été à Vézelay, est publié par La Renarde Rouge en 2015. S'ensuivront Fenêtres (2016), et Tous les jours l'été (2019), aux mêmes éditions, qui composent une "trilogie du sensible". 

Depuis 2017, elle chemine avec la jeune maison d'édition poétique L'Atelier des Noyers, pour laquelle elle a publié une demi-douzaine de titres soit comme auteure, soit comme illustratrice (sur des textes de Philippe Mathy, de Claire Delbard et de Colette Nys-Mazure) : La Vie en Vert, Journal d'une Pierre, Blanc comme la Neige, Iles de la Gargaude, la Bataille des Coquelicots, Chaque aurore te restera première. Elle y assume depuis 2021 la direction de la collection "Quatre chemins", pour laquelle elle a écrit et illustré Le Dit des Passeroses, puis Oser l'insecte (sur un texte de Jacques Moulin), Une année de cerisier (mis en mots par Christian Sapin) et Nuanciel (textes et images).

 
 
 Nourrie de son expérience sensible mais toujours nourrie de références culturelles, son écriture fait de plus en plus place à l’intériorité. Un si grand désir de silence (éditions du Cerf, 2022) et Le jardin nu (Bayard, 2023) dans une veine sensible et empreinte de spiritualité, sont ses essais les plus récents. En septembre 2023, Un si grand désir de silence a reçu le Prix littéraire de la Liberté Intérieure décerné par La Procure, RCF, Ouest France et Le Jour du Seigneur.
 
Enfin, elle collabore régulièrement avec le magazine La Vie, pour laquelle elle est chroniqueuse depuis l'été 2023, et la revue Etudes.



Revue Terre à Ciel, juin 2022, extrait 

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rencontre avec Anne Le Maître, entretien par Cécile Guivarch (début)

Cécile : Chère Anne Le Maître, tu peins, tu écris, tu marches. Tu vois, tu t’émerveilles, tu es en plein dans la vie. Tu vois la vie dans la moindre petite fleur, dans un paysage de montagne, dans les petites bêtes. Qu’apportent la marche et le dehors à ta peinture, à ton écriture, à ton dedans ? Et comment tout cela parvient-il à s’entremêler à ton quotidien ?

Anne : J’ai l’impression que le réel sans cesse me convoque, me requiert. Tout ce qui demande à être regardé, écouté ! C’est à la fois pour moi un mouvement d’émerveillement et, véritablement, une invitation – plus encore : une convocation - à la rencontre. Je ne sais comment l’exprimer mieux que cela.
Il serait inimaginable de ne pas répondre à cette sollicitation, alors je ne peux que « faire avec », et faire du mieux que je peux.
L’expression qui me vient le plus souvent, quand je pense à ce ma pratique littéraire et artistique, c’est « porter parole » : véritablement c’est de cela qu’il s’agit pour moi. Je sais bien que rien n’a besoin de moi, que je ne suis indispensable à aucun pissenlit, à aucune rose trémière, à aucune mésange. Mais puisqu’il m’est proposé d’être un peu plus consciente que la moyenne des gens de leur présence, de leur « être-là », je n’imagine pas de ne pas en rendre compte. C’est peut-être d’ailleurs une définition (parmi d’autres) de la poésie.
Je dirais que d’une certaine manière, j’ai organisé au fil du temps ma vie et mon quotidien autour de cette écoute. Tâchant d’y laisser de grandes plages de silence, comme on laisserait des friches entre les champs cultivés pour voir ce qui peut y pousser. C’est une lutte sans cesse renouvelée tant le quotidien bruyant, accéléré, tente toujours de vous recouvrir. Mais j’ai cette chance que très vite, si je n’ai pas ces friches et ces silences, je ne vais plus bien du tout. Il y a un signal intérieur qu’il s’agit d’écouter, lui aussi...

(la suite est à lire ICI)

 

L'écho magazine (Genève), n°14, 6 avril 2023.article complet à lire ICI.



FEMME D’AVENTURES
(la Gazette de Côte d’Or, 7 mars 2013, par Olivier Mouchiquel)

 
Ses carnets de voyage sont des best-sellers. Prenons une bière, dans un bar à vin, avec Anne Le Maître.

LA JEUNE FEMME, aquarelliste de renommée internationale et plume de talent, rentre radieuse d’un séjour en montagne. Ses livres ? Des succès d’édition. Les Cévennes dans les pas de Stevenson, Sens ou Dijon revisitées par leurs chemins secrets. Chili, Afrique, Laponie suédoise… Elle sillonne le monde à pied.
            Dijonnaise ayant grandi à Sens, bercée par les vacances à Pierreclos en Saône-et-Loire, Anne Le Maître eut une enfance choyée par une grande famille et une bande de copains, partant à sept ans déjà en tournée avec sa chorale. À la maison, elle retrouvait le monde de la lecture et du dessin. Histoire de s’occuper.
« Ma maman dessinait bien. Mon grand-père également. Employé, il relevait les compteurs de gaz. » Anne Le Maître s’inscrit dans une lignée tournée vers le livre. Son père, un des grands spécialistes de l’histoire de l’Église au Moyen Âge, en a signé plusieurs dont un sur les invasions barbares. Elle retrouve même trace d’un arrière-grand-oncle fondateur d’un ordre monastique, qui était prêtre et publiait sous pseudonyme des poèmes d’amour.
            Anne Le Maître fut cinq ans urbaniste, aiguisant son regard de géographe sur la construction des paysages. « Je voyais autour de moi des gens plus âgés dévorés de l’intérieur par ce métier. » Elle n’insiste pas et partage désormais son temps entre l’enseignement en collège, les élèves de son atelier et l’écriture.
« Le rythme d’une phrase me vient avant les mots. Je lis mes phrases à haute voix. C’est une question de souffle et de musique : écrire va bien avec la marche. » Quitte à éprouver une répulsion physique à la relecture lorsque le style n’est pas parfait.
            « J’ai fait de la musique médiévale pendant neuf ans, je dessine toujours en musique. J’ai écrit un livre entier en écoutant uniquement, avec la fonction repeat, le deuxième mouvement du Concerto Empereur
pour piano de Beethoven. La musique crée le cercle magique dans lequel je me concentre. »
            L’escalade apporte au peintre un espace de décompression, de ressourcement pour créer. Anne Le Maître prépare une exposition pour Cîteaux autour d’une session de travail d’ethnologues et de philosophes, qui servira de support à une réflexion sur la nature et l’homme. « En te confrontant à la nature tu fais connaissance avec toi-même. Tu te vois plus petit et ça, ça calme. » La dimension spirituelle est présente dans son œuvre. Une croyance moderne. « La foi, vécue de façon profondément spirituelle et non comme appartenance à une religion à laquelle il faut obéir, te rend libre. »
            Pour Anne Le Maître, comme pour Élisabeth Badinter, la maternité n’est pas une condition de la féminité. « Il y a beaucoup de fécondités, qui ne sont pas que féminines. Je suis extrêmement reliée  au monde par mes mots, mes livres, mes aquarelles, mes cours. Un enfant n’aurait pas forcément rajouté grand chose dans l’histoire. »
            Des rencontres réelles ou de lecture l’ont encouragée : la voyageuse suisse Ella Maillart disant « Il faut aller voir. » Barbara Kingsolver, Blaise Pascal, Nicolas Bouvier. Des rencontres avec des moines et des moniales. « Il y a quelque chose de la vie monastique dans la vie d’un écrivain. »
            « Je trouve ignoble qu’une femme en voyage soit plus vulnérable qu’un homme. Je trouve injuste que l’on soit soumise à cette peur de l’agression sexuelle, mais en même temps je la refuse. Si on accepte cette peur, on a tout perdu. J’ai fait 3 000 km à pied seule en France pour un nombre incommensurable de belles rencontres. Ça vaut la peine de prendre ce risque. Le monde n’est pas un terrain de jeu. C’est une vision masculine. Le monde est un lieu de rencontres, bonnes ou mauvaises. Si tu parles avec d’autres aventurières, comme Karine Meuzard, elles te diront la même chose. »
            Quand ses élèves lui avouent écrire eux aussi, Anne Le Maître les encourage. « Personne n’est dans une case et chacun peut faire ce qu’il veut. Il ne faut rien s’interdire sous prétexte que les gens te mettent des étiquettes. Tu es prof, ou tu es une femme, une intello, une sportive… Tout est faux et tout est vrai à la fois. J’adore l’escalade, et j’adore le tricot. » .